Il y a un puits, là, juste devant moi. Et à côté une chèvre. La chèvre mange de l’herbe.

Je regarde à l’intérieur du puits. J’y vois nettement un village de singes nains et roses. Ils dansent tous autour d’une statue géante. Une cerise. Un petit homme bleu de penche vers moi et, avec un sourire narquois, me balance dans le puits. Les singes me regardent tomber, immobiles. Le petit homme bleu rie de plus belles. La chèvre mange de l’herbe.

Les petits singes roses s’activent en voyant que je me rapproche de plus en plus dans leur direction. Ils déplacent l’immense cerise et laissent apparaitre un énorme trou dessous celle-ci. J’y tombe en plein dedans. Le bonhomme bleu a drôlement bien visé. Je ne l’entends plus rire. Je n’entends plus les bêtes roses et poilues danser. Je n’entends plus rien. Mais la chèvre, elle mange toujours de l’herbe.

Je tombe sur un matelas orange. Il est doux et brillant. Partout autour de moi des oiseaux verts volent dans tous les sens. Le matelas bouge, bousculé par les vagues. Je navigue sur l’océan, admirant le comportement des animaux à plumes. Puis le petit homme bleu apparait soudain, avec deux micro-singes roses à ses épaules. Il rie méchamment et saute sur le matelas orange. Il saute et saute et saute et saute. Et je tombe. Emportée vers les profondeurs de la mer, la pression de l’eau m’empêche de bouger et l’air se raréfie. J’ai encore l’impression d’entendre l’affreux éclat de rire de l’abominable petit homme bleu, avec ces horribles singes roses sur ses épaules. Je m’enfonce de plus en plus. Et pendant ce temps, la chèvre mange de l’herbe.

Je me retrouve sur une plage. Le sable y est rouge. Le Père Noël pelote une pom-pom girl. Un éléphant jaune joue à la marelle. Tout est si paisible que ça m’en donne le sommeil. Je m’étire, épuisée, et me couche à même le sol, me recouvrant d’algues au chocolat pour me réchauffer. A peine ai-je fermé l’œil que j’entends cet irritable son si familier. C’est lui, le petit homme bleu. Suivie de plusieurs petits singes roses et le Père Noël. Cette fois il ne m’aura pas. Je cours vite, très vite. Les arbres en guimauve se déplacent sur mon chemin. Puis je trouve un avion, tout de livres construit. Je m’installe à bord et le pilote pour m’échapper. Je vois ceux qui me suivaient diminué de taille avec l’altitude. Ça sent la cannelle. Je n’aime pas la cannelle. L’odeur s’amplifient avec le temps, elle en devient insupportable. Je perds le contrôle de l’appareil qui se dirige en plein dans un volcan de vodka, orné de fleurs noires et blanches. Je n’ai peine à imaginer le rire de petit homme bleu si il aurait vue le ridicule de la situation. Je pleure des larmes de verre. Ça me pique les yeux. Et même comme ça, la chèvre mange de l’herbe.

Je tombe sur de l’herbe verte. Bien verte. Quelques fleurs colorent le tout. Au loin, j’aperçois une tâche. Je m’approche doucement. C’est le puits. Et la chèvre. Je regarde à l’intérieur. Il y a de l’eau, juste de l’eau. J’entends un bruit et me retourne vivement. C’est la chèvre, juste la chèvre. Je m’en vais sans me retourner. Je sais très bien ce qu’il y a voir. La chèvre mange de l’herbe.